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Tour du Monde de Bougainville > Etape 0 : Le Tour de chauffe !

Le Tour de chauffe !

Le 04 août 2019

250ème anniversaire de la fin du voyage autour du monde de Bougainville (1767-1769)

Louis Antoine de Bougainville effectue son périple (diplomatique et scientifique) sur 2 navires de la marine royale : La frégate la Boudeuse qui part de Nantes le 17 novembre 1766 et revient très rapidement en ayant cassé deux mâts dans la rivière Loir et qui repart de Brest le 5 décembre 1766 vers les Canaries. La flûte l’Etoile. qui part de Rochefort le 1 février 1767 par la rivière Charente. 314 hommes d’équipage sont embarqués à bord plus un aumônier, un chirurgien, le Prince de Nassau, l'astronome Veron, le cartographe Romainville, le naturaliste Commerson et leurs domestiques dont celui de Commerson, Jean Barré* (une femme déguisée en homme ce qui est formellement interdit sur les vaisseaux du Roi !).
 

La Boudeuse est un navire de guerre à trois mâts, de 550 tonneaux pour 40 mètres de long. Elle porte 32 canons. Elle fait partie d’une nouvelle classe de bâtiments (dont le prototype est l’Hermione, lancée en 1748). La Boudeuse avait un pont unique. Sous ce pont, un faux pont donnait un vaste entrepont où logeait l’équipage ; matelots, mousses et soldats couchés dans des hamacs [le] partageaient avec les boeufs, moutons et cochons embarqués vivants pour les premiers jours de traversée. Sur l’arrière logeaient les officiers mariniers et canonniers. Sur l’avant 2 petites chambres de 2x2,50 m logeaient l’aumônier et le chirurgien. Sous le gaillard, à l’arrière, la grande chambre (de 7 m de large sur 6 m de long), sur laquelle était prise la chambre de Bougainville. Une vaste table était fixée au milieu entourée de sièges formant caissons à provisions. Sur l’avant de cette grande chambre, de chaque bord, on trouvait deux chambres de mêmes dimensions que celles du faux pont et prévues pour un ou deux officiers. Sous le gaillard avant, se trouvaient les cuisines ; officiers, maîtres, matelots et soldats ayant chacun la leur. Ces cuisines se limitaient d’ailleurs à un bac à sable et quelques marmites plus ou moins grosses [...]. Le gaillard d’arrière était réservé aux officiers et timoniers qui le partageaient avec quelques centaines de poules, oies, dindes, etc. Sous le faux pont, s’étendaient les soutes comprenant, à partir de l’arrière, la soute du maître canonnier, au-dessus de la soute à poudre. Puis la soute à pain, une vaste cale s’étendant jusqu’au grand mât contenait les vivres. Puis sur l’avant la soute à eau, puis la soute aux voiles et, sur l’arrière du mât de misaine, la soute aux câbles. Enfin à l’avant, la soute du maître de manoeuvres contenant filins et poulies, surmontant une deuxième soute aux poudres. Il est à remarquer que sur les navires de commerce un entrepont s’établissait au-dessus du pont, logeant passagers et équipage et tout l’espace sous le pont était disponible pour la cargaison. On comprend que Bougainville ait eu des difficultés à embarquer les vivres nécessaires à sa campagne dans ses soutes ainsi réduites. » La Boudeuse n’emporte que 6 mois de vivres aux capacités de conservation incertaines sous un climat chaud et humide. C’est pourquoi elle est accompagnée d’une flûte chargée d’emporter 6 mois de vivres supplémentaires. L’Etoile (navire de transport, de 480 tonneaux) porte 20 canons. Pour comparer, les plus grands vaisseaux de commerce de l’époque, ceux de la Compagnie des Indes, font 600 tonneaux. Malgré les dimensions des navires, l’espace sur les navires est exigu pour un aussi long voyage.
 

L. Denoix,. Les bateaux du voyage de Bougainville La Boudeuse et l’Étoile, Journal de la Société des océanistes Tome 24,1968.
 

A son retour, Bougainville se félicitera de n’avoir que peu de morts à déplorer dans son équipage. C’est vrai que, en deux ans et quatre mois, il n’y a eu que dix décès sur la Boudeuse : [...] quatre ont péri noyés, deux sont mort du scorbut [...], deux de dysenterie contractée à Batavia [...], un de phtisie [...], et un de maladie indéterminée [...]. En fait, ce résultat, dix morts, accidents compris, pour 213 personnes embarquées sur la Boudeuse, et deux morts sur les 120 personnes de l’Etoile, était remarquable, comparés aux malheurs d’Anson, de Wallis, de Carteret et de Byron, et même de Cook à son premier voyage sur l’Endeavour [...]. Rappelons aussi, à titre de comparaison, que pour un voyage en Chine de deux ans, la mortalité moyenne des bâtiments de la Compagnie des Indes était de 20%, soit le cinquième de l’effectif.
 

Carr Adrien. L’Expédition de Bougainville et l’hygiène navale de son temps. (Journal de la Société des océanistes). Tome 24,1968

Depuis août 2019 les Editions Alzieu conduisent un travail de mémoire1 sur les traces de Bougainville, de l'astronome Véron, du cartographe Romainville, du naturaliste Commerson accompagné de Jean(ne) Baré (une des premières femmes à avoir réalisé un tour du monde) et de quelques autres dans leur voyage autour du monde qui cherchaient au XVIIIème siècle à dresser l'inventaire des richesses naturelles de la planète, à mettre les connaissances et les savoirs sur le monde qui nous entoure à la portée de tous afin de mieux comprendre notre environnement. Cet héritage, bien souvent dilapidé, nous l'avons reçu et nous le devons aux habitants de ces territoires souvent inconnus ou étrangers qui ont su les accueillir puissions nous Puissions nous enfin comprendre ce que nous avons à faire en retour pour le monde de demain, « le nôtre » et celui des « autres », comme nous y invite un manifeste du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris : « Quel futur sans nature ».
Au départ de Rochefort la première partie de ce long voyage de 70 000 km nous a conduit au travers des 5 continents : De Lisbonne aux Iles Canaries et aux Iles des Açores, du Brésil (Porto Alegre) à l’Uruguay (Montevideo, Colonia del Sacramento), de l’Argentine (Buenos Aires, La Plata, Ushuaia, Rio Gallego) au Chili (détroit de Magellan, Terre de Feu, Puerto Natale, Puerto Montt, Santiago, Ile de Pâques), de Tahiti, Auckland, Noumea à Cairns (Australie), de Port Moresty (Nouvelle Guinée) à Singapour, Bali, Java et Jakarta (Indonésie), de l’Ile Maurice à l’Ile de la Réunion. Après avoir côtoyé différents incidents (Incendies aux Canaries et en Australie, paralysie sociale et politique au Chili, épidémies de Chikungunia, de Zika et de Dengue, notre voyage fut bloqué, en mars 2020 par la pandémie Covid et le confinement général, à Saint Denis de La Réunion.
La deuxième partie, en 2023, du voyage sur les traces de Bougainville sera l’occasion de compléter les étapes manquantes (Iles des Tuamotu, Samoa, Vanuatu, Salomon, Bougainville, Fort Dauphin à Madagascar et Le Cap en Afrique du Sud) et de rencontrer, d’écouter, de parler avec les enfants de Marillac à Fort Dauphin où le Père Pierrot Rakotoarison continue la mission du Père Albano Passarotto, décédé en juillet 2020, dans l'école qu'il a créé et accueille plus de 1500 enfants qu'il faut nourrir (gratuitement) et leur offrir une éducation et un enseignement de manière à leur permettre d'avoir un avenir meilleur et ceux de Khayelitsha (township de la métropole du Cap Town) où Maria Botha (Classes d’enfants violonistes) et leurs équipes œuvrent dans ces milieux défavorisés depuis de nombreuses années pour leur transmettre les rudiments d'une éducation scolaire ou musicale, susceptibles de leur permettre de dépasser la réalité de famine et de faillite du monde d'aujourd'hui avec l'espoir de mieux vivre dans celui de demain. Pour tous ces enfants le futur c'est l'espoir d'aujourd'hui !
 
“L’homme, par son égoïsme trop peu clairvoyant pour ses propres intérêts, par son penchant à jouir     de tout ce qui est à sa disposition, en un mot, par son insouciance pour l’avenir et pour ses semblables, semble travailler à l’anéantissement de ses moyens de conservation et à la destruction même de sa propre espèce…
Il amène rapidement à la stérilité ce sol qu’il habite, donne lieu au tarissement des sources…
Il est perpétuellement en guerre avec ses semblables, et détruit partout, sous tous prétextes…
On dirait que l’homme est destiné à s’exterminer lui-même après avoir rendu le globe inhabitable.”

                                                                                                                                                               Lamarck – 1820
                                                                                
1 Exposition itinérante (20 banderoles) sur la découverte des plantes du monde et rencontres avec les habitants.